Construire une saison théâtrale, c’est non seulement associer et ordonner une chaîne de projets artistiques dans une certaine cohérence et complémentarité, mais c’est aussi constituer le tissage coloré d’une histoire fictionnelle ou d’un récit partagé; c’est rassembler les fragments de notre mémoire collective, de nos visions ancestrales poétisées, d’une pensée du temps présent et de ce qui sera transmis aux générations futures.

C’est à la fois un acte de re-création ou de re-constitution de ce tissu millénaire que les conteurs et les bardes nous ont transmis pour prolonger les savoirs et les expériences.

Nous sommes en effet tissu, papyrus, chair. Nous sommes tous des êtres libres qui chantons, qui dansons, qui transmettons l’héritage de cultures dans l’espace et dans le temps à travers nos gestes, nos pas et le souffle de nos paroles.

Au théâtre, nous sommes les lecteurs du monde, de notre propre comportement et de celui de l’autre, car, sur le plateau, la nature se lit, l’espace se lit, le cosmos se lit, l’invisible se lit : le théâtre est teatrum mundi.

Lorsque vous suivez le sentier (voire traversez le labyrinthe initiatique) pour venir vers nous, vers le TKM, spectacle après spectacle, vous choisissez de contribuer à la cristallisation de ces lectures, à créer ce tissu visible, cet espace de confluences, où nous pouvons exercer notre mémoire et notre imaginaire, cet endroit qu’habite l’esprit festif du carnaval, de la célébration, du rituel où le quotidien devient transmutation – et nous vous en remercions.

Croire et faire sont au cœur de tout au théâtre ; faire croire par la convention consciente du comme si…, traverser ensemble la porte dorée de l’imaginaire pour mieux revenir au réel et peut-être le transformer. Quoi de mieux, donc, qu’un théâtre au cœur d’une cité en métamorphose pour vivre et penser le monde ?

Omar Porras